La pause accordée par Donald Trump dans la guerre commerciale à la majorité des pays du monde, à l'exception de la Chine avec laquelle les tensions ne cessent de croître, laisse aux banques centrales et aux investisseurs un nouvel environnement économique incertain dans lequel naviguer.
Entre décisions de politique monétaire, conséquences des tensions commerciales sino-américaines et nouvelle donne économique, tour d'horizon des perspectives de marché dans les jours à venir :
1/ ROTATION DES ACTIFS
Les politiques erratiques de Donald Trump en matière commerciale ont secoué les marchés financiers la semaine dernière et fait exploser les indicateurs de volatilité d'un côté et de l'autre de l'Atlantique. Si la pause de 90 jours accordée à la majorité des pays du monde concernant les droits de douane dits "réciproques" a fait descendre ces "indicateurs de la peur" et rebondir, dans une certaine mesure, les marchés actions, des changements de paradigme pourraient être en cours.
Les investisseurs se délestent ainsi de certains actifs pourtant longtemps considérés comme refuges à l'image des bons du Trésor et du dollar. "Quelque chose de plus grand est aussi en jeu : réduire les déséquilibres commerciaux bilatéraux équivaut de fait à baisser la demande d'actifs américains", ont remarqué les analystes de Deutsche Bank dans une note, commentant les mouvements sur les rendements américains au cours de la semaine.
D'autres actifs consolident au contraire leur statut, à l'image de l'or qui a dépassé pour la première fois les 3.200 dollars l'once.
2/LA BATAILLE DE PÉKIN
Le "jour de la libération" promis par Donald Trump ressemble désormais de plus en plus à une bataille rangée entre Washington et Pékin.
Non seulement la Chine n'a pas bénéficié du sursis de 90 jours accordé par Donald Trump à la plupart des partenaires commerciaux des États-Unis, mais elle a vu ses droits de douane augmenter à 145% par le 47e président américain.
En riposte, Pékin a annoncé vendredi augmenter à son tour ses droits de douane sur les importations américaines de 84% à 125%, en menaçant d'aller encore plus loin en cas d'intensification des tensions entre les deux puissances.
Une série de données économiques est attendue dans les prochains jours sur la Chine, notamment sur le commerce, la production industrielle et les ventes au détail. Surtout, le pays doit publier mercredi des éléments sur la croissance du produit intérieur brut (PIB) au premier trimestre 2025 alors que les économistes anticipent un ralentissement de sa croissance en glissement annuel.
3/ VERS UNE BAISSE DES TAUX DE LA BCE
Les conséquences de la guerre commerciale et des incertitudes qui planent toujours dans le domaine seront au cœur de la réflexion des gouverneurs de la Banque centrale européenne (BCE) qui se réunissent jeudi.
Les marchés tablent désormais sur une nouvelle baisse de 25 points de base, ce qui ramènerait le taux directeur de la banque à 2,25%, et prévoient deux autres baisses par la suite.
Si l'Union européenne a suspendu pendant 90 jours ses premières contre-mesures contre les droits de douane dits "réciproques", les réflexions continuent au sein du bloc face aux incertitudes planant au-delà de la pause accordée par Donald Trump.
Le commissaire européen au Commerce, Maros Sefcovic, se rendra dimanche à Washington pour des discussions sur la querelle tarifaire en cours, avant que la présidente du Conseil italien Giorgia Meloni ne rencontre le président américain jeudi.
4/ UN ŒIL SUR LE CONSOMMATEUR
Les données mensuelles sur les ventes au détail aux Etats-Unis, qui seront publiées mercredi, seront scrutées pour déterminer la manière dont les droits de douane et l'incertitude pèsent sur le comportement des consommateurs américains.
L'indicateur n'a connu qu'un rebond marginal au mois de février, les consommateurs ayant réduit leurs dépenses discrétionnaires, tandis que les indicateurs de confiance des consommateurs ont été mis à mal.
Les marchés devraient aussi réagir aux résultats d'entreprise au titre du premier trimestre 2025, les grandes banques de Wall Street ayant ouvert le bal. Le géant du streaming Netflix NFLX.O doit présenter ses résultats jeudi.
En Europe, LVMH LVMH.PA publiera lundi son chiffre d'affaires trimestriel, un indicateur clé de la santé du luxe dans un contexte qui était déjà difficile pour le secteur avant même l'annonce de droits de douane américains.
5/ DES SABLES MOUVANTS
Les politiques erratiques de l'administration Trump ont aussi mis sous pression les pays émergents, les pays à haut rendement et moins bien notés ayant subi un impact disproportionné sur leurs coûts d'emprunt par rapport à leurs homologues mieux notés.
Le nouvel ordre mondial du commerce posera de nouveaux défis à un certain nombre de décideurs politiques qui doivent faire face aux perspectives de ralentissement de la croissance et aux probables pressions inflationnistes croissantes.
Sur le plan monétaire, la banque centrale de Turquie devrait maintenir inchangé son principal taux directeur jeudi tandis que des interrogations sur les marges de manœuvre de la banque centrale d'Egypte subsistent. La banque centrale de Corée du Sud pourrait de son côté être contrainte d'avancer ou d'accentuer les réductions de taux d'intérêt cette année face au risque de récession.
(Rédigé par Kevin Buckland à Tokyo, Lewis Krauskopf à New York, Yoruk Bahceli, Amanda Cooper et Karin Strohecker à Londres ; compilé par Karin Strohecker, version française Bertrand De Meyer, édité par Blandine Hénault)
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